« En 20 ans, les jeunes ont perdu 20% de leur capacité physique » Assis devant son ordinateur, le professeur Paul Menu, ancien chef du service de cardiologie au CHU de Poitiers, montre une série de statistiques et d’images « On parle de bombe à retardement, mais c’est pire que ça : c’est une bombe qui peut exploser à tout moment. Sur 25 ans par exemple, le risque que les femmes développent des maladies cardiaques a grimpé de 18%.«
Le constat a largement dépassé les frontières de la Vienne et des Deux-Sèvres mais, à l’échelle nationale, nos deux départements ne sont pas très bons élèves. « La Viennepar exemple, est le département de la région le plus sédentaire !« , alerte le Pr Paul Menu. En effet, selon les données de l’ARS Nouvelle Aquitaine de 2018, 69,9% de la population est sédentaire contra 55,7% dans les Deux Sèvres52,2% en Corrèze, 54,2% en Charente Maritime ou encore 62,4% en Haute Vienne.
« Bouger, c’est rester en bonne santé »
Autre constat régional : 41% des Néo-Aquitains pratiquent seulement une activité sportive régulière (30 minutes par jour pour les adultes, 60 minutes par jour pour les enfants et adolescents), selon les données 2021 de Santé Publique France. « Il ne s’agit pas de faire du cardio de haute intensité, là on parle vraiment de l’activité physique, du mouvement de base« , rappelle le professeur Paul Menu « .C’est le sport de tous les jours : descendre du bus un arrêt plus tôt pour marcher 50 mètres, aller faire un panier, se garer un peu plus loin de l’école et accompagner son enfant jusqu’au portail. C’est vrai à tout âge, et pour les adultes, il s’agit aussi de donner l’exemple aux enfants« .
L’ancien chirurgien insiste : bouger, c’est rester en bonne santé. « Il produit des déchets dans notre corps. Dès qu’on bouge, notre cœur s’accélère. Dès que notre cœur s’accélère, le cerveau est plus oxygéné, nettoyé des détritus, et les autres organes comme les reins, les poumons, ainsi de suite. Un fait, quand il ne bouge pas, c’est comme si les éboueurs ne passaient pas dans la rue. A la fin, ça dégrade notre capitale santé avec par exemple, des risques d’AVC« .
Comment remettre les jeunes au sport ?
Les jeunes, en particulier, sont ciblés par les médecins. « Je fais du sport à l’école mais le soir je peux rester trois ou quatre heures d’affilée sur mon téléphone à regarder des vidéos sur Tiktok, confie Sarah, 14 ans. Parfois je me dis mais va courir, fais des abdos, lève toi, fais quelque chose de ta vie !« Jean, 20 ans, n’est pas non plus un adepte de l’activité physique. »Je monte les escaliers chez moi, ça me suffit largement !plaisante-t-il. Mais c’est vrai que je le sens physiquement. Courir pour hacher le train, c’est pas facile, c’est limite si tu fais pas une crise d’asthme à la fin.«
« C’est le drame des écransalerte le Pr Paul Menu. C’est plus facile de rester trois heures devant une série que d’aller faire un pied copain entres et copines. » Chez les jeunes (jusqu’à 25 ans), neuf filles sur dix ne font pas assez de sport. Et chez les garçons, c’est six sur dix. « C’est vraiment inquiétant et leur santé mentale aussi en pâtit. Depuis la crise sanitaire, le nombre de dépressions chez les jeunes explose.«
Il donne quelques conseils pour aider les jeunes à s’y remettre : offrir des trottinettes plutôt que des consoles, faire des sorties sportives en famille, proposer aux enfants d’aller à la piscine plutôt que de regarder un film en streaming. « Il faut réussir à leur montrer que quand ils bougent plus, ils dorment mieux, ils sont en meilleure forme, ils ont envie de vivre, envie de quelque chose.«
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